Amélie Mansfield[Volume III, pp. 239 - 241] LETTRE CVII [Continuation I][p. 239] Elle a voulu parler tête à tête au médecin: nous attendions dans l'antichambre. Quand il est sorti, Ernest éperdu m'a dit d'une voix entrecoupée, [p. 240] et en posant son bras sur le mien: "Parlez-lui . . . . demandez-lui . . -- Eh bien! docteur, comment est-elle? nous attendons ici notre arrêt. -- Le moment est très-inquiétant: on n'a pas assez ménagé l'état de cette dame; elle a éprouvé tant de secousses, que tu annonce une crise qu'elle n'aura pas, je le crains, la force de soutenir." Ernest est tombé sur le parquet comme frappé de la foudre. Dans ce premier moment, je n'aurais pu le secourir: je ne voyais plus en lui que l'assassin de ma soeur . . . . O justice suprême! pour un instant d'oubli, pour une seule faute, la mort de la coupable! . . . . Que dis-je, hélas! la mort de tous deux: Ernest n'y survivra pas --- --- O ma Blanche! que de remords dans mon âme! Non je ne me suis pas acquitté des obligations que mon père m'avait imposées: j'ai consenti qu'Amélie s'éloignât de moi; au premier mot qui m'a décelé le sentiment qui l'occupait, je n'ai pas volé à son secours: ne devais-je [p. 241] pas la connaître? ne devais-je pas être convaincu que cette âme ci tendre ne croirait avoir assez accordé à l'amour qu'en ne lui refusant rien? ne savais-je pas que si elle était trop passionnée pour ne pas écarter toutes les méfiances et manquer à ses principes, elle était trop pure pour se consoler de sa faute et ne pas mourir du sacrifice? -- L'infortunée! tous les hasards se sont réunis pour la trahir -- J'entends du bruit dans sa chambre -- j'y cours. |